Revues scientifiques

Revue internationale d'éducation de Sèvres, (52) 2009

Un seul monde, une seule école ?
n° 52, décembre 2009

Sommaire du numéro

Actualité internationale

Dossier
Un seul monde, une seule école ?
Coordonné par Alain Bouvier, Professeur des universités et membre du Haut conseil de l’éducation.

Introduction [pdf - 279 Ko]
Un avenir pluriel et hybride
Alain Bouvier

L’école et les communautés
Thierry Breton, ancien ministre de l’Économie, des finances et de l’industrie, senior lecturer à la Harvard Business School (États-Unis).
Le mot « communauté » est le fil conducteur de cet article qui commence par une approche macro-économique du monde contemporain. L’auteur interroge le rôle des communautés dans la gestion des systèmes éducatifs, dans un monde qui sera marqué par le protectionnisme et interpellé vivement sur les régulations et les contrôles. Une évolution se dessine en direction de l’identification et du respect des communautés, en particulier professionnelles, désormais plongées dans « l’économie de l’immatériel ». Devant la crise planétaire actuelle, les éducateurs ont un rôle majeur à jouer en se rassemblant sur des valeurs communes, car le monde à venir sera multicommunautaire.

Éducation : du cosmopolitisme au globalisme
Pavel Zgaga, Professeur, Université de Ljubljana, Slovénie.
Il existe une croyance ancienne en un progrès continu vers un monde meilleur, qui se double de la conviction que le bien est associé au savoir et à la recherche du savoir, c’est à dire à l’apprentissage. Sur ces bases, il a été attendu de l’éducation qu’elle apporte une contribution significative à l’avènement d’un monde meilleur. L’article s’interroge sur cette contribution au regard des avancées de l’internationalisation et de la globalisation dans le monde contemporain. Le concept d’éducation est abordé à travers le cosmopolitisme du siècle des Lumières, le nationalisme des XIXe et XXe siècles, l’internationalisme du XXe siècle – en particulier le processus d’européanisation – et enfin à travers l’âge du globalisme que nous connaissons aujourd’hui. Contre une « vue monocausale » du globalisme, l’auteur appelle à la reconnaissance de toute une variété de finalités éducatives.

Les modèles mondiaux, européens et nationaux en éducation
Roger Dale, Professeur, Université de Bristol, Royaume-Uni.
L’auteur propose une approche philosophique qui contribue à déplacer les interrogations classiques sur la globalisation et à en changer la perspective. Plutôt que de tenir les notions de « modèle » ou de « système éducatif » pour acquises, il pose la question fondamentale de savoir pourquoi nous raisonnons en ces termes, et à quelle forme de projet politique et social ces modèles sont associés. Ainsi, considérer par défaut un système éducatif à partir de l’échelle nationale pose plusieurs problèmes. En effet, si l’État-nation demeure, il ne revêt plus le même sens que par le passé. D’autre part, l’échelle supra- (ou infra-) nationale ne peut être lue comme un simple déplacement d’échelle de logiques qui, elles, resteraient identiques. Au contraire, il est fondamental d’interroger la conception même de l’éducation et de sa fonction sociale, qui est déployée à divers niveaux et par divers types d’acteurs.

L’école et ses héritages
Françoise Martin-Van der Haegen, Adjointe du directeur de l’École supérieure de l’Éducation nationale en charge de l’enseignement supérieur.
Sans chercher à modéliser ou à proposer une typologie des résistances, l’auteur s’interroge sur les variables qui jouent un rôle d’accélérateur ou de frein dans le changement. À partir des cas du Portugal, de la Hongrie, du Cameroun, du Japon et d’une comparaison entre les systèmes éducatifs des États-Unis et de la France sont questionnés l’importance des niveaux de gouvernance, l’influence du débat public sur les jeux des acteurs, le « modèle politique d’éducation » de référence, le processus de décision et le management de son application. Les études de cas sur lesquelles s’appuie l’article portent certes la marque de leurs auteurs mais aussi des héritages et nostalgies qui colorent et influencent les évolutions.

L’évaluation de l’école par les standards internationaux
Jean-Marie De Ketele, Professeur émérite de l’Université Catholique de Louvain et de la chaire UNESCO en sciences de l’éducation.
Les standards internationaux envahissent le monde de l’école : au niveau des discours d’abord, au niveau des prescriptions ensuite, puis au niveau des évaluations. L’article s’arrête d’abord sur le concept de standard qui est loin d’être univoque selon les cultures, tant sur le plan de la signification que des connotations. Il pose ensuite la question fondamentale du choix des standards et de la cohérence entre les standards proclamés et les évaluations externes qui envahissent le quotidien de l’école.

Contenus et valeurs
Bigarrure du monde, convergence des questions
Roger-François Gauthier, Inspecteur général de l’administration de l’Éducation nationale et de la recherche, consultant auprès de l’UNESCO.
Florence Robine, Inspectrice générale de l’Éducation nationale en France (sciences physiques et chimiques fondamentales et appliquées).
À partir de cinq études de cas (Angleterre, France, Inde, Sénégal, Suède), les auteurs constatent que la mondialisation n’entraîne pas, à l’heure actuelle, d’uniformisation des contenus : cette pédago-diversité dans les valeurs enseignées est une richesse. En même temps, tous les systèmes sont confrontés à des questions semblables : les contenus vont de moins en moins de soi et sont devenus un élément majeur de questionnement sur la qualité de l’école, selon qu’ils sont plus ou moins cohérents et « pris au sérieux » par l’école elle-même, qui fait parfois le contraire de ce qu’elle dit. L’article conclut sur des pistes de recherche et sur des propositions politiques.

Fractures sociales et inégalités scolaires
Pierre-Louis Gauthier, Inspecteur d’académie (H).
Parmi les inégalités que génèrent nos sociétés, les inégalités scolaires constituent la plus grande injustice que l’on puisse commettre envers de futurs citoyens, parce qu’elles oblitèrent leur avenir. Face à l’accroissement des inégalités sociales au XXIe siècle, l’éducation peut-elle encore jouer le rôle de compensation qui fut longtemps le sien au sein même des fonctions régaliennes de l’État ? Des exemples empruntés à des horizons politiques, économiques, culturels différents (Chine, Uruguay, Espagne, Allemagne, France) apportent des réponses nuancées à cette question.

L’éducation, segment du marché scolaire ?
Bernard Cornu, Professeur des universités, directeur de la formation au CNED (Centre national d’enseignement à distance).
Dans une société du savoir, se développe un marché scolaire, fondé sur de nouvelles offres et de nouvelles demandes d’éducation. Comment l’école réagit-elle au sein de ce marché ? Comment le service public se situe-t-il face à l’offre privée qui se développe ? L’offre se diversifie, des services nouveaux apparaissent. Les réponses à ces questions varient d’un pays à l’autre : positionner l’école publique au sein du marché scolaire est un choix politique. L’article s’appuie sur des études de cas portant sur la Corée du Sud, la Finlande, le Maroc et la Russie, ainsi que sur une étude transversale sur le tutorat privé.

Des mondes, des écoles
Michel Lussault, Professeur des universités, président de l’Université de Lyon.
Roger Dale, Professeur, Université de Bristol.
David Istance, Centre pour la recherche et l’innovation en éducation (CERI) de l’OCDE.
Mamadou N’Doye, Ancien Ministre de l’alphabétisation, de l’éducation de base et des langues nationales du Sénégal, président du Réseau éducation pour tous en Afrique (REPTA).
Tapio Säävalä, Commission européenne.
L’article s’ouvre sur une synthèse par Michel Lussault des interrogations transversales survenues lors des ateliers du colloque « Un seul monde, une seule école ? ». Cette première partie évoque des évolutions de fond, comme la démocratisation de l’école ou la mondialisation à des échelles différentes, et suggère des perspectives d’action. Quatre réactions d’experts sont proposées ensuite, qui témoignent de points de vue variés. Les contributeurs insistent sur la possibilité d’une lecture positive d’un « monde scolaire unifié », pour autant qu’on rappelle avec force que le développement ne peut être conduit contre les populations et leurs besoins fondamentaux d’éducation. L’ensemble des contributions invite à dépasser la lamentation sur le statu quo pour (r)ouvrir la question des attentes et des aspirations sociales, et mener une réflexion sur les valeurs et les missions fondamentales de l’école.

Eau et éducation : des biens communs
Riccardo Petrella, Professeur émérite à l’Université catholique de Louvain, secrétaire général du Comité international pour un contrat mondial de l’eau.
À partir d’un parallèle entre l’eau et l’éducation définies comme des biens communs, l’auteur interroge les finalités que se donnent les systèmes éducatifs. Ont-ils pour objectifs d’éduquer à la citoyenneté entendue comme la reconnaissance du droit de chacun à la vie ? Visent-ils à apprendre aux jeunes que l’autre est « nécessairement pluriel ? » Se donnentils les moyens, dans leurs projets pédagogiques, d’insister sur la notion de responsabilité perçue non comme une obligation mais comme un choix constructif ? L’auteur plaide pour un projet pédagogique inspiré d’un paradigme sociétal communautaire de partage.

Convergence internationale et diversification interne des modèles scolaires
Bernard Charlot, Professeur émérite de Sciences de l’éducation de l’Université Paris 8, Professor Afiliado de l’Université de Porto (Portugal) et Professor-Visitante de l’Université Fédérale de Sergipe (Brésil).
« Un seul monde, une seule école ? » Le colloque de mars 2009 a tout à la fois constaté la diversité des écoles et montré que, dans de nombreux pays, elles affrontent des problèmes et des défis qui sont des effets de la globalisation. La diversité des systèmes éducatifs découle de celle des valeurs sociales dans lesquelles ils s’enracinent. En outre, les résultats des évaluations internationales comme PISA montrent que des systèmes éducatifs très différents répondent avec succès aux exigences de la globalisation. Toutefois, les pressions de la globalisation induisent une différenciation interne des systèmes scolaires, entre un réseau d’éducation défini par des standards globaux et, pour les plus pauvres, des écoles fondées sur des valeurs nationales.

Abstracts

Resúmenes

Repères

La formation et le développement du système éducatif public mexicain
Yves Robin

Le système éducatif vietnamien
Sébastien Asseraf-Godrie

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